Matcha 2017, quatre cultivars

Après suffisamment de maturation depuis le printemps, les premiers lots de tencha 2017 sont passés sous les meules en pierre, et voici enfin les matcha 2017.
Cette année encore je propose des matcha non assemblés, des cultivars purs par M. Tsuji du secteur de Shirakawa à Uji.
Alors que la tendance générale cette année pour les thés ombrés, gyokuro et kabuse-cha, est à un manque de force, à ma grande surprise, ces matcha me semblent plus robustes que l'an dernier. Si j'aurais tendance à dire que pour certains tencha (le Asahi en particulier) il faudrait même attendre l'hiver pour moudre, cette année, même avec ce premier lot, chacuns offrent déjà beaucoup de caractère.
Je propose donc cette année encore les cultivars Asahi (en ombrage traditionnel honzu), Uji-hikari et Samidori. Tous trois sont des cépages à thés ombrés originaires de Kyôto, issu de sélection à partir de théiers locaux zairai, ou de croisement de cépages 100% originaires de ce département à l'histoire du thé si riche. Cette absence d'héritage de cultivars provenant d'autres régions est une particularité propre au thé de Uji. On peut dire la même chose d'autres cultivars à thé ombré comme Gokô, Narino ou Komakage.
Cette année je propose aussi de Saemidori de Tsuji-san. L'an dernier j'en avez proposé un, en très faibles quantités, mais d'un autre producteur. Saemidori, cultivar à sencha, croisement de Yabukita et de Asatsuyu, est le cultivars qui connaît la plus grande progression depuis une dizaine d'année, et ce dans tous le pays, pour le sencha, le gyokuro et même le matcha, puisqu'il possède un taux de théanine (umami) plus important que la plupart des anciennes variétés à thé ombré de Kyôto. Saemidori est aussi prisé pour sa couleur, et plus encore son caractère hâtif. Néanmoins, sa faible résistance au froid lui interdit les région de production très exposées au givre, comme les zones de montagne à Shizuoka, ou bien les régions plus au nord-est comme Sayama ou Sashima. Il est certain qu'il ne remplacera pas Yabukita (certes moins doux, il faut dire que Yabukita est malgré tout globalement bien supérieur du point de vu gustatif).
Bref, Saemidori est arrivé à Kyôto comme le « el gringo » des cultivars, mais a réussi à s'y imposer pour les thés haut de gamme.

Bien évidemment il s'agit encore de « vrais » matcha, ombrés sous tonnelles (pas de couverture directe), arbres non taillés (shizen-shitate) et par conséquence récolte manuelle. Par ailleurs on ne procède qu'à la récolte de printemps uniquement : une seule récolte annuelle n'est possible sur une plantation shizen-shitate, car après la récolte, les arbres sont coupés très bas, et on les laisse repousser librement jusqu'au printemps (on procède « seulement » au tekishin en automne, chaque nouvelle pousse est coupée une à une, de manière à obtenir au printemps des pousses et feuilles uniformes, c'est un travail très fastidieux mais nécessaire pour obtenir le meilleur).

 Utilisé aussi bien pour le matcha que pour le gyokuro, c'est avec Gokô (peu utilisé pour le matcha) le grand classique des cépages de Uji à thé ombré.
Ce matcha est très onctueux, probablement le plus aérien des quatre. Il me donne une impression de fruité, avec un umami élégant mais très présent. Cet umami, ce sucré est profond et très long en bouche.
Ce Samidori, est peut-être le plus simple d'accès, le plus facile à apprécier, en particulier pour les débutants.

 C'est un cultivar aussi utilisé pour le gyokuro, mais assez rare non assemblé. Uji-hikari a un fort caractère, et peut paraître un peu typé pour un cultivar à thé ombré.
Ce matcha est ainsi très fort, avec une attaque puissante, une pointe d'astringence, avec un umami discret mais très profond.
J'y vois des arômes de bois sec, une impression minérale, presque animal même.
Par ailleurs, alors que les gyokuro sont très « sages » cette année, un cultivar incisif comme Uji-hikari est justement parfait, et je recommande très fortement le gyokuro Uji-hikari deShirakawa.

 Voilà donc le fameux Saemidori.
Nous avons d'abord une attaque assez forte, pas autant que sur le Uji-hikari néanmoins. L'umami semble diffus, mais l'ensemble est d'une grande rondeur. Les arômes mêlent noisette grillées et herbe fraîche. On a une belle longueur en bouche, très tendre.
On sent un caractère différent dans les arômes/parfums que sur les cultivars autochtones de Uji.

Voici enfin le top de la production de M. Tsuji, cultivé en ombrage honzu (avec stores en bambou et paille). Asahi est généralement considéré comme le plus haut de gamme pour le tencha, mais est peu utilisé pour le gyokuro.
C'est la première année où je le ressent si puissant dès l'automne, il faut souvent attendre la fin de l'année pour le voir se révéler mieux. Dès la première attaque il a une grande présence en bouche, avec un bel umami bien équilibré. J'y trouve toujours ces arômes et parfums de pâtisserie et de confiserie.

J'avais un peu peur cette année pour les matcha, et finalement, ce Asahi le premier, ils me surprennent dans les meilleurs sens du terme.

Encore une fois, il s'agit de matcha sans blend, chose très rare, impensable même pour beaucoup de professionnels à Kyôto. D'une manière générale, je ne pense pas que le blend apporte grand chose (sinon du point de vu économique), mais il reste vrai que dans le cas particulier du matcha, on peut parfois trouver un manque de profondeur lorsqu'ils ne sont pas assemblés (franchement cette année je n'en suis pas su certain). Ainsi, il reste alors très ludique, de procéder avec ces différents cultivars à des blends maison directement dans le bol. C'est très simple et permet de multiplier les plaisirs.
Par exemple, ½ de Uji-hikari / ¼ de Samidori et ¼ de Saemidori permet d'ajouter complexité d'arômes et douceur au fort caractère de Uji-hikari.
Ou encore, ½ de Samidori, ¼ de Uji-hikari et ¼ de Asahi permet de donner plus d'impact à la douceur et au sucré de Samidori.
Les combinaisons sont infinies, et permettent de trouver son « matcha idéal ».

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