Deux kama-iri cha de Miyazaki, deux tendances

Je suis très heureux de pouvoir présenter sur Thés du Japon deux excellents kama-iri cha de Miyazaki. Le premier est la version 2012 du thé de Takachiho, cultivar Minami Sayaka, déjà présent en 2011. Le second provient d'un autre haut lieu du kama-iri, Gokase. Il s'agit du cultivar Yabukita, mais surtout, c'est l’œuvre de Kôrogi Yôichi, une sommité de l'art du kama-iri cha

Ces deux thés montrent deux tendances différentes. Tous deux ont ce parfum particulier des kama-iri cha, nommé kama-ka 釜香, et que j'identifie comme une saveur de châtaigne ou de patate douce grillée. Ils ont de la légèreté, une liqueur rafraichissante, transparente et pure.
Mais derrière ces fragrances typiques des kama-iri de qualité, on trouve comme un enrobage très différent.
A gauche, Minami Sayaka ; à droite, Yabukita

Celui de Takachiho conserve quelque chose de très vert, légumineux. Et sa liqueur possède des saveurs douces et sucrées communes aux sencha. On retrouve un arrière goût de pêche ou d'abricot avec quelque chose de velouté et crémeux qui semble une qualité propre à ce cultivar Minami Sayaka (voir ce sencha).



En revanche, le thé de Monsieur Kôrogi passe complètement dans des saveurs grillées et tourbées, sorte de parfum de torréfaction, mais différent de celui d'un sencha fortement "torréfié" (hi-ire). Il y a bien du sucré, mais mais le registre s'éloigne de la douceur des acides aminés des thés japonais étuvés. Celui-ci désorientera donc plus l'habitué des sencha autres thés étuvés japonais... pour son plus grand plaisir, j'espère. Il est complétement dénué d’astringence.



J'ai aussi pratiqué une infusion d'examen/compétition sur ces deux thés. Cela montre quelque chose d'intéressant.
Au premier abord, Minami Sayaka semble bien plus séduisant, en effet ses feuilles semblent plus entières, la couleur plus jolie (encore que là c'est en se basant sur les critères des thés étuvés). Après quelques minutes dans l'eau chaude, confirmation : belles feuilles ouvertes bien entières, alors de celui de Gokase est plus fragmenté.
A gauche Yabukita, à droite Minami Sayaka



Pourtant, au bout de 5 minutes, lorsque l'on enlève les feuilles pour vérifier l'aspect de la liqueur, la différence saute tout de suite aux yeux. Celui de Gokase est parfaitement translucide, d'une splendide luminosité, alors que celui de Takachiho possède un léger dépôt, et est un peu troublé, et ce malgré des feuilles plus entières !



D'ou vient cette différence ? Je n'en suis pas certain. Peut être la technique du producteur  ? Différence de cultivar ? J'ai posé la question.
Le Minami Sayaka de Monsieur Kai est réalisé de la manière traditionnelle. En revanche, Monsieur Kôrogi ajoute une touche personnelle dans la fabrication de son kama-iri cha. Après le chauffage des feuilles "Cha qing", les feuilles sont passées dans la machine à malaxage dite "sojû-ki" (粗揉機 malaxage grossier) alors qu'habituellement, celle-ci n'est pas utilisée pour le kama-iri, on passe directement dans la machine à malaxage (jûnen-ki 揉捻機) à malaxage moyen (中揉機 chûjû-ki). Il en résulte des feuilles mieux malaxées, une plus belle couleur, mais des feuilles peut être aussi plus brisées.

Après, en ce qui concerne parfum et goût, l'un et l'autre sont de formidables kama-iri cha, avec chacun leur particularités. Je ne saurais dire lequel je préfère, mais disons que celui de Gokase est plus particulier, plus dépaysant aussi.

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